Wang Chuqin au firmament, les Français dans l’histoire, deux Smash en été : qu’attendre de l’après Doha ?
Image : ITTF
Les championnats du monde se sont achevés en apothéose ce dimanche, et de multiples drapeaux ont flotté au-dessus des podiums. Bousculée, la Chine domine toujours, mais laisse entrevoir de nombreux possibles pour une deuxième partie de saison déjà très attendue.
De tous les enjeux que portaient ces championnats du monde au Qatar, le plus crucial concernait le tableau simple messieurs. Un mois après la victoire historique de Hugo Calderano à la coupe du monde – qui avait battu successivement Wang Chuqin et Lin Shidong – la pression qui reposait sur ces deux derniers était immense. À la confiance maximale du Brésilien s’ajoutait la question de la TTR (Table Tennis Review), cette nouvelle technologie d’arbitrage vidéo qui avait rebattu certaines cartes à Macao.
Dénué de champion du monde déjà titré, le tableau fut passionnant à suivre, d’autant que tous les favoris ont répondu présents. Notamment Calderano, plus grande menace donc, qui a offert ce qui restera comme l’un des plus grands matchs de l’année (et de sa carrière) contre Liang Jingkun (n°5 mondial et tombeur de Lin Shidong) en demi-finale. Remonté de 10-3 à 10-9 à la belle, sans doute encore hanté par sa désillusion de 2021 contre le même joueur, le n°3 mondial est allé arracher sa finale d’un contre top revers enragé : c’était sa troisième victoire de rang contre l’élite chinoise.
Face à lui, Wang Chuqin a joué son meilleur ping en finale (4-1), comme le point d’accomplissement suprême de son retour en force des derniers mois. Vaincu 4-2 à Durban il y a deux ans par son compatriote Fan Zhendong en finale, il a cette fois trouvé le chemin de la victoire en distribuant des balles surpuissantes en restant prêt de la table (c’était en reculant qu’il avait échoué à Macao). Ce premier titre mondial en simple, le plus grand de sa carrière, referme sans doute la plaie parisienne et place le numéro 2 mondial dans les meilleures conditions pour retrouver le sommet du classement, à quelques semaines du United States Smash.
Sun Yingsha reste imbattable
Chez les dames, moins de surprise. La moitié des sets encaissés par Sun Yingsha pendant le tournoi le furent en finale, contre Wang Manyu (4-3). À part elle, seule Shin Yubin a opposé une vraie résistance en huitième (4-2). La n°1 mondiale conserve son titre obtenu en Afrique du Sud, et reste donc, une fois de plus, seule sur sa planète. Associée à Wang Chuqin en double mixte – le duo star de tennis de table mondial –, elle s’est offert son troisième titre mondial de rang, en plus de l’or olympique obtenu à Paris en août dernier.
Wang Manyu peut néanmoins se consoler avec un deuxième titre de championne du monde en double dames, quatre ans après celui obtenu à Houston aux côtés de Sun Yingsha. Associée cette fois à Kuai Man, elles ont ensemble redéfini l’expression « survoler le tournoi », dans la mesure où aucune paire, en six matchs, n’a été capable de leur arracher ne serait-ce qu’un set, ou même de les emmener une fois aux points d’écarts. Un parcours sidérant et sans équivalent.
Double messieurs : la dure loi du sport
Comme souvent, le tableau double messieurs a eu son lot d’émotions côtés français, pour le meilleur et pour le pire. Pour le meilleur d’abord, au regard du parcours croisé deux paires françaises – plus grandes chances de médailles –, qui ont toutes les deux répondu présentes malgré d’un côté un Alexis Lebrun diminué et forcé d’abandonner en simple, et de l’autre des paires déterminées à faire chuter Florian Bourrassaud et Esteban Dorr (n°5). Après la frayeur du premier tour (3-2 contre les Espagnols Daniel Berzosa et Juan Perez), les numéros 1 mondiaux ont déroulé jusqu’en demi, offrant au passage l’un des points du tournoi contre Anton Kallberg et Truls Moregardh : un sublime sauvetage de filet avec effet rétro signé Alexis Lebrun, qui n’a rien perdu de sa virtuosité. C’est la jeune paire taïwanaise composée de Kao Cheng-jui et Lin Yun-ju, qui avait fait des ravages au dernier Singapore Smash, qui a fait chuter les deux frères dans le dernier carré.
La « Team Rocket » (tels se sont autoproclamés Bourrassaud et Dorr), elle, a encore montré son don pour le come-back face à la paire hispanoroumaine Alvaro Robles / Ovidiu Ionescu (vice-champions du monde en 2019) en quart de finale, pour s’offrir une première médaille en championnats du monde. Dans l’explosion de joie qui s’est ensuivie, Esteban Dorr a fait un faux mouvement, se blessant au genou gauche et se voyant forcé, quelques heures plus tard, de déclarer forfait. Ils devaient retrouver en demi la paire japonaise Togami/Shinozuka, qui, en battant les Taïwanais, a offert au Japon sa première médaille d’or en double messieurs depuis 64 ans. Une fin de parcours difficile pour les tricolores, retenons surtout ce podium mondial à moitié Grand-Sud-Estois.
Et maintenant ?
Les championnats du monde étaient la grande échéance de l’année, vouée à faire un portrait global du ping international, de ses forces en présence, des progressions à surveiller et des surprises à identifier. C’est chose faite : la Chine a tenu bon face aux différentes tempêtes, remportant quatre des cinq tableaux à Doha. À notre sens, plusieurs questions se posent maintenant : d’abord, Alexis Lebrun participera-t-il au WTT Star Contender de Ljubljana du 17 au 22 juin pour finaliser sa remise en forme ? Il est le seul nom qui manque vraiment à l’appel, alors que l’on y attend Hugo Calderano, Tomokazu Harimoto, Félix Lebrun ou encore Xiang Peng. Ensuite, Hugo Calderano ou Truls Moregardh, demi-finalistes à Doha, peuvent-ils offrir son premier WTT Smash au reste du monde, en juillet à Las Vegas ou à Malmö en août ? On rappelle que la plus prestigieuse des compétitions régulières du circuit n’a pour l’instant jamais échappé à l’Empire du Milieu. Enfin, Wang Chuqin y détrônera-t-il son compatriote Lin Shidong, moins performant depuis Singapour ? Autant de questions pour un été qui s’annonce passionnant, où l’on espère, une nouvelle fois, voir briller le ping de tous les continents.