Sun Yingsha : joueuse-monde

Sun Yingsha : joueuse-monde

Images : Weibo

 

En remportant la coupe du monde pour la deuxième fois consécutive, et sans jamais avoir été inquiétée, Sun Yingsha a imposé une énième fois sa suprématie sur le tennis de table mondial. Par ailleurs figure culturelle et médiatique de premier plan en Chine, elle empile les contrats avec les plus grandes marques. Du jamais-vu sur la planète ping. Edito initialement paru dans la newsletter du vendredi 2 mai.

 

 

Dans les domaines culturels et artistiques, on parle parfois d’œuvres-mondes. Des romans, des films, qui par leur amplitude thématique et leur ambition démiurgique donnent l’impression de déployer tout un monde. Une notion assez floue, aussi contestable que subjective, indissociable de cette fascination pour la grandeur qui nous habite un peu toutes et tous, et qui nous pousse à bâtir des hiérarchies entre les choses. En sport, c’est un peu différent : la grandeur et l’importance sont plus quantifiables, la hiérarchie s’impose d’elle-même. Gagner la coupe du monde pour la deuxième fois d’affilée et s’affirmer comme l’incontestable numéro 1 mondiale avec plus de 11.000 points, soit le double de ceux de la n°2, ce n’est pas une opinion sujette à interprétation. Tout comme ne l’est pas le fait d’être la personnalité la plus suivie sur un réseau social, ou d’avoir le plus long temps d’apparition sur les panneaux publicitaires.

Ce qui fait de Sun Yingsha une joueuse-monde – peut-être la première qu’ait connue notre sport, du moins à ce niveau – ce n’est pas seulement la domination qu’elle exerce sur le ping féminin mondial. C’est aussi le fait que son nom, désormais, ne convoque plus seulement le ping, mais bien tout un écosystème aux multiples enjeux économiques, culturels et sociétaux. En 2025, la valeur commerciale de l’image personnelle de Sun Yingsha excède 300 millions de yuans (37 millions d’euros), une somme qui surpasse nombre d'entreprises cotées en bourse. La maison chinoise de smartphones Oppo, le géant du fast-food KFC, La Roche-Posay, Coca-Cola, L'Oréal Paris, etc : la joueuse de 24 ans ne compte pas moins 27 contrats de sponsoring dans des secteurs aussi variés que la beauté, la technologie, l'automobile et le luxe – le dernier en date étant la marque d’eau BRITA. Fait notable, 68 % de ces collaborations concernent des marques non liées au sport, une véritable révolution vis-à-vis des schémas traditionnels des sportifs ambassadeurs, qui place le ping au cœur d’enjeux industriels nouveaux. 

Personnalité la plus suivie sur Xiaohongshu, à l’origine de plus de 340 tendances Weibo en un an seulement, Sun Yingsha exerce une immense influence sur les réseaux sociaux – renforcée par le duo qu’elle forme avec Wang Chuqin, un peu à l’instar des frères Lebrun. Un succès remarquable qui repose selon beaucoup d’observateurs sur l'équilibre subtil entre douceur et détermination. Le contraste entre sa bouille attachante et sa capacité à trucider ses adversaires fait d’elle une source d’inspiration inépuisable pour des memes, trends et autres montages vidéo destinés à circuler sur les réseaux. Sun Yingsha est ainsi bien plus qu’une athlète : elle est l’incarnation parfaite de la génération Z, le symbole d’un monde où le sport, l’influence digitale et le commerce ne cessent de dialoguer.