Quelle importance a encore la coupe du monde ?
Image : ITTF
Du 14 au 20 avril se tiendra, à Macao pour la deuxième année consécutive, la nouvelle formule de la coupe du monde ITTF. Une des rares compétitions issues du monde d’avant le WTT, réunissant les 48 meilleurs pongistes de tous les continents, et en vue de laquelle les favoris se sont préservés ces dernières semaines. Pourtant, l’ITTF a plus d’une fois montré qu’elle ne savait plus trop quoi en faire. Edito initialement paru dans la newsletter du jeudi 10 avril.
Il n’est pas toujours facile de se repérer dans le circuit international de ping. Depuis son apparition en 2020, le WTT a révolutionné le haut niveau avec son esthétique futuriste, sa terminologie spécifique (Feeder, Star Contender, Smash…), et son calendrier au combien chargé. Si nous avons fait le choix de ne pas nous y risquer, les nombreuses comparaisons faites par les médias traditionnels entre le WTT et le circuit ATP du tennis font sens : elles permettent de hiérarchiser les évènements – un Champions serait l’équivalent d’un Masters 1000, un Contender d’un ATP 250, un Smash d’un tournoi du Grand Chelem –, et ainsi de raccrocher le ping à des repères à peu près maîtrisés par le grand public.
En revanche, il persiste deux différences de taille entre les deux circuits : 1/ il n’y pas de championnats du monde de tennis ni de coupe du monde de tennis. 2/ Là où les Jeux olympiques sont le graal absolu du ping, ils sont, au tennis, un tournoi assez anecdotique en deux sets gagnants. À cet égard, si les notions de “champion du monde” et de “champion olympique” résonnent comme des objectifs de vie pour les pongistes – témoignant de l’importance capitale des tournois qui y sont attachés –, la coupe du monde conserve ce statut un peu étrange, séduisant sur le papier et pourtant bancal dans sa réalité. En témoignent les incessants changements de formule qu’elle a subis ces dernières années : l’ITTF World Cup sur trois jours avec 20 joueurs, les WTT Cup Finals sur quatre jours avec 16 joueurs, la nouvelle coupe du monde par équipes mixtes à Chengdu, et désormais la World Cup Macao sur sept jours avec 48 joueurs… On ne sait plus vraiment ce qu’est cette compétition, ni si l’ITTF veut que nous y voyions autre chose qu’une répétition générale des championnats du monde le mois prochain.
Dans le “monde d’avant” (WTT, Covid 19, choisissez), la coupe du monde annuelle constituait le plus accessible des trois grands rendez-vous du haut niveau (avant les Championnats du monde tous les deux ans et les JO tous les quatre ans), nécessaires à l’accomplissement de ce qu’on appelait alors le Grand Chelem du tennis de table (le fait de remporter de rang les trois titres). Exploit que des joueurs comme Ma Long, Ding Ning, Zhang Jike ou encore Fan Zhendong sont les derniers à avoir accompli. Mieux diffusée que les Open et les Pro Tour, cette coupe était alors un incontournable du calendrier pour les joueurs comme pour le public. Mais à l’ère des WTT Smashes, pensés comme des Grands Chelems par à peu près tout le monde, l’est-elle encore ? Que valent vraiment les 1500 points promis au vainqueur quand chacun des quatre Smashes en rapporte 2000, et des six Champions, 1000 ? C’est quoi, aujourd’hui, faire le Grand Chelem du tennis de table ?
Comme son versant par équipes mixtes à Chengdu, la nouvelle coupe du monde individuelle se tient à Macao pour la deuxième année consécutive. On ne sait trop quoi penser de cette information, sinon que la faire se tenir désormais à un seul et même endroit risque de lui soustraire son essence mondiale, historique. Sa grandeur est toujours là. Il s’agirait simplement, pour le public comme pour l’ITTF, de ne pas finir par y voir un WTT Macao Smash dissimulé. Ce serait dommage.